«Le pratyahara lui-même est dénommé Yoga, parce qu’il est la branche la plus importante du Sadhana Yoga.» Swami Shivananda

Le système classique du yoga incorpore 8 branches selon Patanjali, chacune ayant sa place et sa fonction : yama (les principes relationnels), niyama (les principes personnels), asana (la pratique des postures), pranayama (la pratique d’exercices respiratoires, le contrôle du souffle), pratyahara (le retrait des sens), dharana (la concentration), dhyana (la méditation), samadhi (l’intégration compléte avec l’objet de la méditation). Parmi ses 8 membres, le pratyahara est sûrement la moins connue.

Qu’est-ce que le Pratyahara ?

Selon David Frawley, dans son livre Yoga & Ayurveda, Le terme pratyahara se compose de deux termes sanskrits, prati et ahara. Ahara signifiant “nourriture“ ou “tout ce que nous absorbons de l’extérieur“. Prati est une préposition signifiant “contre“ ou “éloigné“. Pratyahara signifie littéralement “contrôle de ahara“ ou “acquisition de la maîtrise des forces externes“. Il est comparé à une tortue repliant ses membres sous sa carapace, la carapace de la tortue étant le mental et les sens étant les membres.

Le contrôle des sens (Indriya pratyahara) est la forme de pratyahara la plus importante car nous souffrons tous d’une surcharge sensorielle liée au bombardement constant provenant de la télévision, des ordinateurs, des téléphones portables, des tablettes et des bruits environnants. Nous sommes si habitués aux activités sensorielles continues que nous ne savons plus rester dans le silence. Et pourtant, il fait partie intégrante de la guérison. Tout comme le corps bénéficie du jeûne, le mental bénéficie du jeûne d’impressions.

En outre, la plupart d’entre nous faisons attention aux aliments que nous absorbons et aux personnes qui nous tiennent compagnie mais pas aux impressions que nous absorbons par les sens. Nous acceptons chez nous, par l’intermédiaire de la télévision, des films, des jeux vidéo, des personnes que nous n’accepterions jamais dans notre foyer dans la vie réelle !

En détachant notre conscience des impressions négatives, le pratyahara renforce le pouvoir d’immunité du mental. De même qu’un corps sain résiste aux toxines et aux éléments pathogènes, un esprit sain est en mesure d’écarter les influences sensorielles négatives qui nous entourent.

Nous savons que l’esprit n’est pas déconnecté du système immunitaire. En effet, les interactions entre le cerveau et le système immunitaire sont fortement modulées par des facteurs émotionnels. Une pensée consciente, positive ou négative, provoque en nous une cascade d’événements neurobiologiques qui peuvent activer notre réponse combat-fuite-immobilisation ou notre réponse repos et digestion. Il n’y a pas de différence entre le stress réel et le stress perçu – ou les interactions réelles et celles réellement perçues – en termes d’effets sur les systèmes nerveux et immunitaire.

“Plus nous dirigeons notre conscience vers le corps, plus le système immunitaire devient fort. C’est comme si chaque cellule s’éveillait et se réjouissait. (…) La plupart des maladies s’insinuent quand nous ne sommes pas présents dans le corps.” Eckhart Tolle

Je vous propose désormais une pratique de pratyahara afin de prendre conscience de la nécessité de réduire le temps passé devant les écrans et d’instaurer un moment de silence profond dans votre routine quotidienne. Vous aurez besoin de votre téléphone portable.

Check physique en pleine conscience – 5 minutes

Accessoires nécessaires : un tapis de yoga, une à deux couvertures, un coussin pour les yeux

  • Installez-vous confortablement en position allongée sur votre tapis de yoga en gardant les genoux pliés avec une couverture pour soutenir votre tête, une autre pour vous couvrir et un coussin pour les yeux pour vous isoler de la lumière. Placez vos mains au niveau de votre abdomen, les paumes de vos mains l’une sur l’autre ou bien l’une à côté de l’autre, comme vous préférez. Respirez profondément plusieurs fois. Puis portez votre attention au niveau du point de contact entre vos mains et votre corps. Imaginez que ce point de contact soit comme une passerelle entre votre conscience extérieure et votre conscience intérieure.
  • Respirez naturellement par le nez et demandez-vous : “suis-je à l’intérieur de mon corps ?” “Quel est le degré de présence corporelle à moi-même ?“
  • Puis, observez l’activité de votre esprit : est-ce que les pensées fusent et disparaissent aussi rapidement qu’elles sont apparues ?
  • Notez les éventuelles sensations de chaleur ou de froid, tous les signaux provenant de votre corps, comme la soif, la faim, la sensation de plénitude dans l’abdomen, les douleurs musculaires,…. Percevez les changements au niveau de ces sensations d’un moment à l’autre.
  • Concentrez-vous désormais sur votre ventre. Est-il contracté ou plutôt détendu ?
  • Observez votre état émotif, les émotions que vous ressentez ici et maintenant comme la peur, l’anxiété, la tristesse ou la frustration.
  • Observez également la posture physique que vous prenez actuellement. Vous sentez-vous grand.e et ouvert.e ou bien vos épaules ont-elles tendance à se replier sur elles-mêmes ?
  • Enfin évaluez votre sensation d’enracinement à travers votre colonne vertébrale.

Exercice – 3 minutes

Accessoire nécessaire : téléphone portable ou tablette

Faites défiler votre fil d’actualités Facebook ou celui d’une application d’informations à laquelle vous êtes abonné.e pendant au moins 3 minutes.

Check physique en pleine conscience – 2 minutes

Reprenez la même position qu’auparavant et procédez de nouveau à un check physique en pleine conscience.

  • Observez le degré de présence corporelle à vous-mêmes. Vous vous rendrez compte probablement qu’il est différent qu’auparavant.
  • Observez le rythme de vos pensées.
  • Notez toutes les sensations corporelles.
  • Amenez ensuite votre conscience au niveau de l’abdomen. Qu’observez-vous ? Vous remarquerez peut-être un nœud dans la partie supérieure de l’abdomen.
  • Observez également votre état émotionnel.
  • Portez attention à votre posture actuelle ? Est-elle différente d’avant ?
  • Évaluez ensuite la sensation d’enracinement à travers votre colonne vertébrale.
  • Comment vous sentez-vous ? Qu’est-ce qui a changé depuis le début de votre pratique ?

Salamba Savasana – 20 minutes

Crédit photo : Carlo Cattadori

Modèle : Babette Riefenstahl

Contre-indication : en cas de grossesse de plus de trois mois, effectuez votre savasana sur le côté, la position couchée sur le dos étant déconseillée.

Accessoires nécessaires : un tapis, un bolster, cinq couvertures, un sac de sable et un coussin pour les yeux.

Installation :

  • Asseyez-vous sur votre tapis avec vos genoux pliés devant vous et vos pieds à plat sur le sol. Couvrez vos jambes avec une couverture.
  • Placez sur le tapis derrière vous une couverture standard pliée à deux étages : le plus élevé pour soutenir la tête ainsi que la septième vertèbre cervicale et le plus bas pour soutenir les épaules. Puis ajustez-la au niveau de votre tête en enroulant ses bords le long de votre cou et de votre tête.
  • Placez un bolster sous vos genoux (vos rotules sont situées au milieu du bolster) ainsi qu’une couverture enroulée sous les tendons d’Achille. Allongez-vous sur votre dos et placez vos bras à un angle de quarante-cinq degrés sur les côtés de votre corps. Placez vos coudes sur le sol et les paumes de vos mains tournées vers le ciel. Vous pouvez apposez les avant-bras ainsi que vos mains sur des couvertures carrées de chaque côté de votre corps. Vos poignets se reposent sur le deuxième pli de la couverture et vos mains sont recouvertes d’une épaisseur de la couverture afin de les caresser.
  • Utilisez une autre couverture au-dessus de votre tête pour vous isoler du bruit, et placer un sac de sable sur votre ventre (en l’absence de règles ou de grossesse) afin de vous aider à vous enraciner.
  • Couvrez-vous totalement et placez un petit coussin sur vos yeux pour vous isoler de la lumière.
  • Portez légèrement votre menton en direction de votre poitrine et relaxez-vous pendant vingt minutes dans le silence.
  • Observez la détente progressive de vos muscles, le ralentissement de votre respiration, le relâchement progressif de vos tensions corporelles. Cette première étape est celle de la relaxation physiologique qui prend généralement une quinzaine de minutes en fonction de votre capacité à vous relaxer.
  • Une fois obtenue cette détente profonde, vous aurez la sensation de vous retirer petit à petit du monde sans en perdre toutefois le contact avec lui. Les stimulations du monde extérieur ne perturbent plus votre corps ni votre esprit. C’est cet état de non-réaction qui est appelé pratyahara. Expérimenter cet état nous permet de réagir avec moins d’intensité aux expériences douloureuses ainsi qu’aux pensées négatives et aux émotions. La pratique nous donne le choix de notre réaction. En d’autres termes, la variable c’est moi et comment je choisis d’utiliser mon énergie. Je peux choisir de me laisser happer par ces stimuli ou au contraire je peux choisir de rester au milieu de ce chaos émotionnel et de ne pas y réagir consciemment.

Une fois le temps écoulé, reprenez conscience de votre environnement en effectuant de profondes respirations. Puis, à votre rythme et pas plus vite, tournez vos genoux vers l’intérieur. Portez le bas de votre dos au sol. Pliez un genou puis l’autre, posez vos pieds sur le bolster. Tournez-vous sur le côté de votre choix.  Laissez tomber à terre votre coussin pour les yeux. Lorsque vous vous sentez prêt, reprenez très lentement une position assise en pressant la main près de votre poitrine sur le sol et en vous aidant de l’autre. Avec les yeux toujours fermés, prenez quelques instants pour effectuer de nouveau un check physique en pleine conscience. Et identifier les éventuels changements.

Si vous avez envie d’approfondir le sujet :